Une étoile montante : le conducteur de relève

Soyez rassuré, vous avez très bien réussi en tant que meilleur conducteur canadien avec des statistiques telles que celles de James MacDonald. Troisième derrière Chris Christoforou et Sylvain Filion en matière de gains, et deuxième derrière Trevor Henry en nombre de victoires à ce jour cette année, cet ancien insulaire a également été invité à conduire le concurrent à la Gold Cup and Saucer, Wazzup Wazzup tant dans son essai que dans la finale de la Cup – une course qu’il a perdue de peu.

Par Melissa Keith / Traduction Louis Rioux

Alors, comment quelqu’un devrait-il interpréter cela quand James MacDonald lui dit qu’il n’a jamais aspiré à devenir un reinsman professionnel? Plaisante-t-il, tout comme son frère Anthony pourrait le faire?

« Je n’avais pas autant d’intérêt dans cela que Mark et Anthony, mais à la fin de mes études secondaires, comme Anthony était débordé, je suis allé travailler avec lui, » d’expliquer James.

Gail MacDonald a été témoin de la transformation de son plus jeune fils qui est passé de l’étape de regarder des courses à celle de monter lui-même sur le sulky. « Il passait beaucoup de temps à l’hippodrome, mais n’aimait pas beaucoup se tenir à l’écurie, » se rappelle-t-elle. « Il s’intéressait davantage au hockey et au baseball qu’aux chevaux à cette époque-là, jouant au baseball comme joueur de deuxième but de haut niveau ainsi qu’au hockey à titre de gardien de but très talentueux dans la ligue de hockey. Tout a changé lorsqu’il est parti en Ontario et que son frère l’a assis derrière un cheval, quelque chose s’est déclenché. Son habileté athlétique naturelle ainsi qu’une bonne dose d’esprit de compétition à la MacDonald, a stimulé son intérêt à apprendre ce nouveau sport, mais non seulement cela – il voulait apprendre à être à son meilleur. »

Leur mère, Gail, est photographe de piste au Red Shores Charlottetown, et leur père, Fred, est un chroniqueur sportif très connu qui « demeure à la piste durant l’été, »; c’est ainsi que James a grandi dans une famille engagée dans les courses sous harnais de l’Î.-P.-E., auprès des poulinières de la famille. Ses frères plus âgés, Mark et Anthony étaient en voie de devenir des conducteurs à succès alors que James avait d’autres intérêts. « Je suis revenu d’Ontario pour venir terminer ma première année du collégial au Holland College à l’Î.-P.-E. N’aimant pas beaucoup le marketing ni la publicité, je suis donc retourné auprès d’Anthony, et c’est là que tout a commencé. »

En bas âge, James n’a jamais démontré d’intérêt à devenir conducteur, mais encore était-il un athlète. « J’étais obsédé par les sports, » dit-il à Trot. « J’ai joué au hockey, au baseball. Nommez-les, je les ai pratiqués, et je les ai tous pratiqués avec beaucoup de compétitivité. » Il n’était pas très enthousiasmé par la piste, même s’il aimait son travail à la cantine du Charlottetown Driving Park . Mark et Anthony n’étaient pas des modèles proches, ne vivant plus à l’I.-P.-E., ajoute James. « Nous sommes partis jeunes. Nous sommes partis vers 15 ou 16 ans pour aller travailler aux côtés de Mike MacDonald et ses chevaux, alors mon frère Curtis et moi étions par nous-mêmes là. »

Anthony MacDonald admet qu’il existe une grande rivalité fraternelle en piste entre les frères, mais il est fier d’avoir aidé James à s’établir dans le sport des courses. « Et bien, nous avions une grosse écurie et avions besoin de beaucoup d’aide, et James n’en faisait pas beaucoup à ce moment-là, » dit Anthony. « Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour réaliser qu’il avait du talent. » Quelques années passées à aider dans les diverses écuries de course des Maritimes, ont vite fait de faire ressortir les habiletés innées de James.

« Il est allé dans cette voie, étant disponible aux palefreniers, au point de devenir quelqu’un qui pouvait ‘jogger’ et prendre soin des chevaux dans l’écurie dans le rôle de palefrenier, obtenant littéralement la confiance pour passer de l’entraînement des chevaux à occuper le siège derrière la barrière et j’ai beaucoup fait de lobbying pour qu’il obtienne tôt sa licence de qualification, » ajoute Anthony, ce frère, James, contre lequel il se mesure de façon régulière. « Il est littéralement passé d’un enfant au SportCheck au stade de qualification en moins de six ou sept mois, et je ne crois pas que quiconque reconnaît le pur talent nécessaire pour atteindre le niveau où il en est rendu aujourd’hui, considérant le manque absolu d’expérience qu’il avait quand il est arrivé. »

Les trajectoires des carrières de Mark et Anthony étaient semblables à leurs débuts, puis elles ont divergé. « J’ai grandi sachant toujours que je voulais conduire des chevaux, et pour tous deux, Mark et moi, c’était notre objectif, » dit Anthony. « Mark m’a éclipsé de façon très bizarre, puisque tous deux nous sommes partis de rien. Nous avons commencé par qualifier des chevaux que d’autres de voulaient pas qualifier, ceux qui ruaient et tombaient et ceux qui vous ch**nt dessus, pour ensuite conduire ceux qui ne sont pas supposés être bons, et il en fut ainsi pour moi durant un bon bout de temps! » dit-il en riant. Mark, par contre, a gagné les finales de la Gold Cup and Saucer en 2003 et 2004 aux guides de Sand Olls Dexter, ainsi que le Little Brown Jug en 2006 avec Mr Feelgood, en plus de s’accaparer des O’Brien Awards de 2005 et 2006 à titre de meilleur conducteur avant de se mériter des victoires de la North America Cup 2010 derrière Sportswriter, et sa troisième Gold Cup and Saucer en 2011 avec Blissfull Breeze. Il a quitté en février 2012 afin de conduire régulièrement aux États-Unis.

Anthony compare volontiers la montée de James au sommet de son art à celle de Mark. « Vous savez, j’ai regardé Jody Jamieson et Mark s’emparer de Mohawk réussissant et dominant durant un certain temps, puis j’ai vu Doug McNair et Scott Zeron suivre en quelque sorte la même voie au cours des quatre ou cinq dernières années, mais étant un peu biaisé, je dirais qu’en ce qui concerne les jeunes du Canada en ce moment, personne ne se compare à James. » Il appelle la similarité entre les styles de conduite de Mark et James, de conduites « qui donnent la frousse. »

Bien que les frères conduisent de la même brillante et étrange façon, il y a un autre aspect que Mark et James se partagent, et on parle de leurs graves accidents de course. « La seule faille de James est d’avoir le même penchant que Mark pour les chutes et les blessures, » dit Anthony. « Il a été impliqué dans de nombreux accidents graves que les gens ne reconnaissent pas, et James est très chanceux. Il s’est brisé une jambe dans l’accident de Woodbine l’année dernière, puis il en a eu un autre à Flamboro, plus un autre à Grand River. Mark a toujours trouvé le moyen de se blesser sur la piste. » Tout en s’accordant le crédit d’être le plus casse-cou des MacDonald, Anthony fait remarquer qu’il n’a jamais été affecté par des blessures ayant pu porter atteinte à sa carrière contrairement à celles endurées par ses frères.

James se rappelle son pire accident. « Il s’agissait d’une course ‘Preferred’ à Woodbine. Mon cheval, In Commando, a frappé un fer. Il est tombé et je me suis cassé la jambe. » Avec une cheville en éclats, il a été sorti de la piste sur une civière et fut incapable de conduire durant presque trois mois, ce, tôt en 2013. Pour un conducteur établi depuis longtemps, cela signifierait un recul important ; mais pour un conducteur prometteur, ça aurait pu même être encore plus difficile de revenir sur le sulky à Woodbine et Mohawk. Mais pour James, ça s’est avéré temporaire, même si malheureux, d’être en pause à un moment de croissance de sa carrière. « C’est vraiment ennuyeux d’être étendu sur le sofa et de regarder, mais j’ai été chanceux lorsque je suis revenu, » dit-il. « Pour bien des entraîneurs, vous savez, c’est comme si on leur disait ‘Qu’avez-vous fait pour moi dernièrement ?’ Mais j’ai vraiment été très chanceux – beaucoup m’ont utilisé. Cela m’a pris quelque temps avant de revenir à ma routine, mais une fois celle-ci regagnée, j’ai recommencé à gagner et à obtenir plus de conduites, et de meilleures en meilleures, et tout a fait boule de neige. »

Le 22 juin 2014, James a enregistré sa millième victoire à vie aux guides de Brocks Fortune à Georgian Downs. « À 28 ans, je pense que j’ai beaucoup de bonnes années devant moi. La plupart des meilleurs n’atteignent pas leur sommet avant la mi-trentaine, alors je crois que c’est le bon moment. » dit-il. Le départ d’un habitué de WEG, Scott Zeron, vers les États-Unis, peut avoir aidé le plus jeune des MacDonald à s’établir, et à se rétablir après son accident, mais il y a beaucoup plus que les circonstances derrière son succès. « Le bon moment y fait pour beaucoup, de toute évidence – Scott est parti et je commençais à peine à bien faire. J’ai hérité de bien de ses conduites. Vous savez, le bon moment est important, et le mien était bon je pense, » dit-il en riant. « Je n’ai pas commencé à conduire comme la plupart, à 18 ans, vous savez, dès qu’ils sont admissibles, alors le fait de pouvoir aller à Mohawk et Woodbine pour me mesurer aux meilleurs, est assez génial. »

Anthony dit qu’il y a un troisième facteur derrière l’excellente saison de James. Au-delà de son habileté dans le sulky et du moment opportun du départ de Scott Zeron vers les États-Unis, il y a la capacité du jeune reinsman à bien s’entendre avec les gens. « J’ai dit à James, ‘tu sais, en toute honnêteté, tous ceux qui m’aiment t’aiment aussi. Tous ceux qui me haїssent, t’aiment.’ » se rappelle Anthony. « C’est un gars aimable – je ne peux penser à quelque raison pourquoi les gens ne l’aimeraient pas. » Excepté, peut-être, lorsqu’il s’agit de la bataille entre lui et James à savoir qui sera le prochain à ramener à la maison la Gold Cup and Saucer. Alors les gants tombent. En quelque sorte.

« Au plus profond de moi, je crois que j’aimerais le voir la gagner, mais en même temps, je ne peux m’imaginer le voir être le troisième MacDonald à gagner la Gold Cup. Cela m’ennuierait vraiment, » dit Anthony avec un sourire. Se rattraper en course à la suite d’une longue campagne politique en Ontario, ne lui a pas permis de bien figurer dans le grand événement de cette année à Charlottetown.

« Si vous terminez deuxième sur les neuf coureurs, c’est la même chose! » déclare James sur un ton malicieux au sujet de la principale activité de la ‘Old Home Week’. 2014 a marqué sa quatrième participation à la finale. « Il y a trois ans, j’ai mené Fleet Sensation pour Dean Nixon. Il a connu un mauvais tirage pour la finale – soit la septième position – mais ce fut assez particulier pour Mark, Anthony et moi de participer à la même course. C’est Mark qui a encore gagné ! » Bien qu’il ait conduit dans des courses majeures telles que la Breeders Crown et le Maple Leaf Trot, l’expatrié insulaire espérait une victoire en 2014 sur le gazon, à la maison, aux guides de Wazzup Wazzup. « C’est la course que je veux gagner. Je la regarde depuis mon enfance. Je n’en ai jamais manqué une, » dit-il à partir de son domicile de Guelph, Ontario. « Je ne sais pas si c’est mon plus grand objectif, je veux dire, ayant couru dans de beaucoup plus grandes courses, mais côté prestige, j’aimerais gagner la Gold Cup and Saucer. Il vous faudrait faire quelque chose d’assez grave pour effacer le sourire de mon visage si jamais je gagnais la course! »

Entre temps, James jouit d’une belle carrière sur le circuit le plus difficile du Canada, de même qu’il apprécie les activités des soins quotidiens à prodiguer aux chevaux, activités qu’il partage avec son épouse, Jenna, la fille du conducteur Paul MacDonnell. Le couple s’est marié au début de l’année. Acceptant des conduites de relève en abondance ne lui a pas enlevé le plaisir initial du sport pour le cadet du clan MacDonald. « J’aime aller à l’écurie, travailler avec les bébés, » dit-il dans une voix souriante. « Jenna aime cela aussi – elle les gâte! Vous savez, cela vous sort du lit le matin et je pense que le fait de travailler avec les chevaux vous garde alerte, afin de ne pas perdre cette acuité : vous les voyez le matin et, comme une deuxième nature, le soir. » Il héberge son troupeau Baycairn Training Centre de Campbellville, aux bons soins de l’entraîneur Johnny MacKinnon. James note qu’il aime acheter ou racheter quelques bébés chaque année. « Nous en avons habituellement quelques-uns de corrects ; cette année a été un peu plus tranquille. »

Sur le plan de la compétition, rien n’a été au ralenti en 2014 pour James MacDonald. Le conducteur de relève confesse qu’il n’aspire pas qu’à « n’attraper que les rênes » le reste de ses jours sans une participation pratique sur les chevaux mêmes, mais encore, il est passionnément poussé vers la compétition, et jamais autant qu’avec ses frères. La rivalité entre frères est intense ; comme Anthony l’exprime si éloquemment, « nous sommes tellement pareils que nous ne pouvons qu’en prendre un peu de chacun. C’est comme si vous nous enfermiez dans une chambre, il y en aurait qui se dirigerait vers les urgences et les autres seraient incarcérés! » Il raconte la reprise de certains combats d’Ultimate Fighting Championship au tout début de son écurie, lesquels ne se sont pas bien déroulés pour son frère - « je pense qu’il détient un record professionnel de trois tours autour de l’écurie en 98; il a été étouffé une couple de fois! »

Une sérieuse bataille de la vraie vie, est survenue quand Anthony, 37 ans, s’est retiré quelque temps de la carrière de conducteur pour se faire élire au poste de député du gouvernement de l’Ontario, inspiré en partie par son désir de soutenir l’industrie des courses pour les générations à venir. James a été l’un de ses nombreux jeunes hommes de chevaux à faire campagne de porte-à-porte avec lui. « Ce fut difficile pour bien des gens. J’ai été chanceux. Je commençais à tracer mon chemin à Woodbine et Mohawk quand le programme des machines à sous prit fin, et je suis encore capable de gagner ma vie dans les courses, » dit James modestement.

Le conducteur de WEG dont les rêves d’enfant ne comprenaient pas d’être aux guides des trotteurs et ambleurs vers la victoire, se retrouve maintenant vivant le rêve de bien d’autres enfants - dans les Maritimes, ou ailleurs, où existe une passion pour les courses sous harnais. « Je trouve cela souvent surréel , en me rendant à la barrière pour une course stake. Je regarde à droite et je vois Jody Jamieson, Paul MacDonnell, Rick Zeron, Steve Condren, et tous ces gars, vous savez, les Tetricks, les Campbell, ainsi que Brian Sears et Yannik Gingras, » avec émerveillement. « Quand vous vous rendez derrière la barrière avec eux tous, vous vous sentez comme ‘Wow – c’est quelque chose de vraiment spécial ! »

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